Les arènes de la petite Rome.
- Historiantiqua
- 11 août 2021
- 6 min de lecture
Dernière mise à jour : 6 janv. 2022
C'est le nom donné à notre magnifique ville du Sud, préfecture du Gard. Fondée par une peuplade Celte d'après plusieurs auteurs antiques, Nîmes aurait été pendant l'âge du Fer le principal oppidum des celtes en Méditerranée. En 121 av.J.-C, les romains prennent possession du territoire et la ville de Nîmes se développe notamment avec la création en son centre d'un immense édifice encore debout aujourd'hui et que l'on connait tous pour accueillir un des plus grands festivals du Sud de la France : Les arènes.
L'architecture de l'amphithéâtre
L'amphithéâtre propose une forme elliptique ou ovale qui est très avantageux pour voir tout ce qui se passe en bas, il a une direction qui passe de l'orient vers l'occident. Il fait 133 m de long sur 101 m de large avec une piste sableuse de 68 m sur 38 m, dimension qui ne dépasse pas son grand frère le Colisée mais qui est d'une superficie plus que correcte pour essayer de l'égaler. Il est composé de trois parties qui se superposent :
- Le rez-de-chaussée
- Le premier étage
- L'attique

Photo de l'amphithéâtre, BNF.
En premier lieu, nous avons donc le rez-de-chaussée qui se constitue de portique ouvrant sur 60 arcades à égale distance les unes des autres et qui sont ornées d'un pilastre de deux pieds par deux. A l'étage, on retrouve des portiques perpendiculaires à ceux du dessous par sûreté pour les personnes, ceux-ci sont ornés de colonnes de styles doriques. Pour finir, le dernier étage est ce que l'on appelle l'attique qui sert simplement à terminer l'édifice, on peut y marcher sans danger car on y trouve des petites pièces saillantes qui servaient à mettre des poteaux pour tenir des tentes et ainsi protéger les personnes du soleil.
" Il convient de repartir des voies d'accès nombreuses et spacieuses, en évitant que celles qui viennent d'en haut ne rencontrent celles qui viennent d'en bas; on doit pouvoir les rejoindre à partir de toutes les places, en circuit direct et sans détour, de telle sorte que lorsqu'il quitte le spectacle, le peuple ne soit pas serré, mais trouve, quel que soit le siège qu'il occupait, une issue séparée et sans obstacle" VItruve qui définit les bases de l'édifice.
Au milieu de cette enceinte se trouve un champ couvert de sable où les représentations étaient effectuées. Tout autour se trouve des gradins avec des marches qui servaient de sièges et qui partaient du podium jusqu'à l'attique. Le premier rang est réservé aux personnes de la haute considération, chaque place faisait 20 pieds ce qui permet d'avoir un certain confort et de ne pas être serré. Au total c'est 32 marches qui accueillent 17 000 personnes dans cet amphithéâtre.
Au XIXème siècle, des travaux débutent pour dégager les arènes et enlever les apports modernes et médiévaux pour retrouver les sols antiques, malheureusement il n'y a aucune illustration pour aider à savoir ce qui était antique comme cela l'à été pour Rome ou Pompéi. En 2005/2006 on retrouve dans une nouvelle fouille, à l'intérieur des piliers de la galerie inférieure des encastrements et des mortaises avec des formes et des dimensions variées qui prouvent une occupation intense des arènes durant une longue période.
On compare souvent l'amphithéâtre de Nîmes avec celui de Rome c'est pourquoi elle est appelée ainsi : La petite Rome. Cependant, certains ont quelques différences au niveau architectural, par exemple au lieu d'avoir un encastrement en L renversé on y trouvait une simple gouttière verticale qui est creusée sur les piliers du Colisée.

Pilier extérieur de la travée 39 du colisée de Rome, EFA par N. Monteix.
Deux autres monuments sont aussi particuliers que celui-ci, possèdent des façades extérieures avec des galeries :
- Le théâtre de Marcellus de Rome.
- Cirque de Tarragone.
L'amphithéâtre n'a que très peu d'ornements, il n'existe des moulures que du côté du soleil couchant, le reste de l'édifice est en pierre dégrossie et simplement taillée. Les seules pierres taillées ont tout d'abord été placées pour être taillées avec propreté. Les quelques décorations que nous pouvons constater se font grâce à la statuaire mais également grâce à des panneaux en bas relief notamment sur le garde-corps du premier étage.
Parmi des endroits qui ont des ornements, nous avons la porte du septentrion où figurent deux taureaux aux genoux pliés. Grâce aux médailles ont voit que les bœufs et les taureaux sont des symboles des colonies romaines il est donc compréhensible de trouver des statues de taureaux sur cet amphithéâtre romain dans la colonie de Nîmes.

Photo des taureaux présents sur l'amphithéâtre de Nîmes, article Pellé. R.
Pour ce qui est des bas reliefs, on trouve la figure d'une louve avec deux enfants qui veulent téter, il renferme un autre symbole parlant, le symbole du droit de citoyens Romain que Rome a donc accordé aux Nîmois.

Photo de la Louve sur une colonne de l'amphithéâtre, article Pellé. R.
Une datation qui a plusieurs hypothèses
Plusieurs hypothèses ont vu le jour en ce qui concerne la datation précise de la construction de cet amphithéâtre. Dans son livre, Emile Esperandieu indique plusieurs de ses découvertes réalisées en 1937 notamment la découverte d'un bloc de pierre blanche de 35 cm de long. On y voit un masque humain sur une face qui date d'après lui de la construction du monument. Ce bloc de pierre lui donne des raisons de penser que la date du IIème siècle ap. J.-C donné jusqu'alors n'est pas assez ancienne. Esperandieu indique que ce masque daterait non de l'époque romaine mais de l'époque indigène datant alors du Ier siècle av. J.-C.

Photo du masque, article d'Esperandieu. E.
Une autre hypothèse serait que la construction de l'édifice serait comprise entre 54 et 95 de notre ère c'est-à-dire sous les empereurs de Néron à Domitien. Des monnaies attestent qu'il y aurait eu deux colonisations à la ville de Nîmes : La première sous Jules César et la seconde sous Auguste après la bataille d'Actium. L'opinion veut que Rome ait créé l'amphithéâtre après 64 mais rien ne prouve que les colonies n'en possédaient déjà pas avant. Pompéi par exemple avait déjà un amphithéâtre dès la première moitié du Ier siècle de notre ère.
Et si Nîmes avait été colonisé par des campaniens qui sont envoyés au nombre de 80 000 et non par des légionnaires romains, il serait donc possible que l'amphithéâtre ait été construit comme le préconise l'hypothèse d'Esperandieu.
Mais d'autres découvertes qui avaient été faite auparavant bousculent tout de même les opinions peu vraisemblables et réalistes d'Esperandieu comme la découverte de 1809 d'une inscription retrouvée dans les arènes :
VIII.TRI.PO.....
Celle-ci permet de conclure que Vespasien, Titus et Domitien sont les seuls à avoir fait 8 fois consuls depuis Tibère, sous lequel il n'existait pas encore d'amphithéâtre dans les provinces ce qui donne comme date de construction entre 77 et 82 ap. J.-C.
Cependant, même avec toutes ces découvertes qui permettent la formulation de plusieurs hypothèses, la date qui reste en vigueur est celle du début du IIème siècle ap. J.-C.
L'évolution d'un amphithéâtre aux arènes
Le but premier de l'amphithéâtre est tout d'abord de divertir avec des jeux sanglants, que ce soit entre gladiateurs ou entre bêtes sauvages et ceux jusqu'à l'arrivée du christianisme vers 404 où les combats sont interdits.
Avec l'arrivée des Wisigoths, l'amphithéâtre est repris et son objectif de départ est modifié, ce nouveau peuple transforme l'édifice en lui ajoutant deux tours d'une hauteur de 60 pieds et de 40 pieds de large ainsi qu'un fossé tout autour du monument. Ils lurent également les arcades des portiques tout cela pour faire de ce lieu un abri de défense. Il devient aussi un refuge assuré pour les habitants des grandes villes pour échapper aux massacres et ravager sur les cités avoisinantes. Cependant, malgré les efforts pour construire quelque chose de sur, si des ennemis se placent à plusieurs angles de cette citadelle, il n'y aurait pas assez de combattants pour tout défendre.

Photo d'une des tours, BNF.
En 737, Charles Martel met à sac beaucoup de villes y compris la ville de Nîmes dont il démolit les remparts mais pas l'amphithéâtre, en revanche il incendie les maisons qui se trouvent à l'intérieur. Pendant longtemps les arènes ont été la propriété des habitants qui occupaient les lieux en référence aux droits romains qui restent en vigueur. Louis VIII en 1226 a lui-même reconnu qu'il ne possédait aucun droit sur l'amphithéâtre.
Plusieurs fois on a essayé de démolir les maisons qui se trouvaient à l'intérieur, même François Ier a déclaré qu'il fallait les enlever. Et c'est le 26 mars 1786 que l'ordre est donné de détruire les maisons après plusieurs années de discussions.
Sur l'illustration ci-dessous on peut voir une rue ouverte sous les arcades qui traversent l'enceinte de l'est vers l'ouest avec deux petites places et des petites impasses. Au total, nous avons treize maisons dans le cirque, soixante-cinq sous les portiques et soixante-douze à l'intérieur, ce qui fait un tout de 150 habitations. Malheureusement, beaucoup n'apprécient pas ces constructions :
"Cet édifice célèbre, dont l'antique magnificence est en quelque sorte déshonorée par des viles constructions élevées dans un siècle de barbarie" Balincourt. E

Plan des arènes avec les emplacements des maisons, BNF.
Aujourd'hui, après avoir déblayé toutes les traces modernes et médiévales pour avoir les traces antiques, cet amphithéâtre toujours au centre de Nîmes est appelé arène et accueille un nombre conséquent de festival et de concert pour le grand bonheur des oreilles des spectateurs dans un cadre magnifique.
Sources :
Balincourt. E. L'ancienne ville des arènes : à qui appartient l'amphithéâtre ?, 1896.
Esperandieu. E. "La date des arènes de Nîmes", Compte rendue de l'académie des inscriptions et des belles-lettres, 81, 1937, p. 236-238.
Pellé. R." L'amphithéâtre de Nîmes : Remarques sur la construction des piliers et l'aménagement de la façade", RAN 42, 2009, p. 217-263.
Ménard. L. Histoire des antiquités de la ville de Nîmes et de ses environs, 1825.
Comments